Dragon sanguinaire, le Graoully a terrorisé les Messins au IIIe siècle avant d’être jeté dans la Seille par Saint Clément, raconte la légende. Depuis lors, la bête ne s’est plus jamais manifestée mais le Graoully n’a pas totalement disparu pour autant.
Le Graoully était un dragon qui vivait au IIIe siècle à Metz, dans l’amphithéâtre, entouré de centaines de serpents venimeux. La « bête » était monstrueuse avec ses écailles sombres qui lui recouvraient le corps et ses immenses ailes de chauve-souris dont le seul claquement dans la nuit, suscitait l’effroi. Et puis il y a sa gueule qui pue le souffre, cette énorme mâchoire armée d’horribles dents faites pour attraper, broyer, déchirer. Combien de femmes, d’enfants et d’hommes a-t-il ainsi dévoré pour remplir sa panse ? La légende ne le dit pas mais souvent il planait au-dessus de la ville en quête de proies. Notamment du côté de la rue Taison qui lui doit d’ailleurs son nom. Quand sa silhouette se détachait dans le ciel, il faillait faire silence pour ne pas se faire repérer. Alors « Taison, taisons-nous ».
Indestructible
Le Graoully n’était pas seulement cruel et monstrueux. Ses grosses écailles le rendaient insensible aux armes les plus affutées. Il était indestructible. Enfin le croyait-on jusqu’à ce qu’il soit terrassé. Et pas par le plus fort des soldats. Non par un homme d’église, un évêque du nom de Saint Clément. Il avait été envoyé à Metz par Saint-Pierre, dans le cadre d’une mission d’évangélisation. Saint-Clément jouissait alors d’une belle réputation, notamment car il avait accompli des miracles. Il aurait notamment ramené à la vie la fille d’un gouverneur romain du nom d’Orius. Mais alors pourquoi ne pas mettre à profit ce fantastique pouvoir pour donner la mort, pour débarrasser la ville du dragon et ainsi sauver des dizaines et des dizaines de vies ? Un légionnaire interpella Saint-Clément en ce sens alors qu’il prêchait la bonne parole. Aux discours, un acte !
Œil du… tigre
Armé de sa seule foi, Saint Clément se rendit alors à l’amphithéâtre, l’antre du dragon. Ce dernier se jeta sur lui comme l’éclair déchire le ciel. Mais l’homme d’église se signa et le toisa du regard. Surpris, le Graoully eut un moment d’hésitation. Une fraction de seconde, le temps d’une étincelle mais cela allait suffire pour le plonger à jamais dans les ténèbres. Saint-Clément lui passa sa toge autour du cou et serra. Le dragon s’agitait pour tenter de se libérer mais en vain. Ses pattes étaient trop courtes pour déchirer l’étole, au sol, ses ailes trop longues l’empêchaient de se mouvoir. Nul ne sait combien de temps dura son agonie mais la légende dit qu’il respirait encore alors que Saint Clément le trainait sur le sol pour l’emmener jusqu’à La Seille où il noya la bête. Metz était enfin libérée de l’odieux dragon et c’est par des clameurs d’une population en liesse que fut accueilli Saint Clément lors de son retour au cœur de la cité. Bon nombre d’habitants se seraient alors convertis au christianisme.
Depuis lors, plus aucun dragon (en tout cas sous cette forme-là) n’a osé jeter son dévolu sur la capitale mosellane. Jusqu’à présent, en tout cas…