Le vendredi 28 septembre 2006, un an et demi après la mort du pape Jean-Paul II, le Conseil municipal doit se prononcer en son point 28 sur la dénomination de l’espace reliant les places d’Armes et Saint-Étienne en « place Jean-Paul II ». De quoi nourrir des débats intenses et parfois houleux …
Cinq intervenants se succèdent dans cette joute oratoire. Thierry Jean, tout d’abord, précise : « je m’exprimerai à titre personnel et mes propos n’engagent pas le groupe dont je fais partie ». Il plante la première banderille : « moi je considère qu’il faut rendre à César ce qui appartient à César et à Dieu ce qui est à Dieu… Ici, vous êtes César, vous n’êtes pas Dieu !… Si, si, c’est une précision utile pour certains de vos adjoints ». Bonjour l’ambiance, le ton est donné. Il déroule ensuite un réquisitoire contre cette dénomination, mettant en avant le manque de consensus du choix, voire certaines positions controversées de Jean-Paul II. Pierre Bertinotti poursuit en précisant, dès le début de son intervention : « décidemment, Monsieur le Maire, l’imagination n’est pas au pouvoir dans notre ville. Moins de huit jours après que le maire de Paris eut décidé de donner le nom de Jean-Paul II au parvis de Notre Dame, voilà que vous nous annoncez par voie de presse que la place de la Cathédrale s’appellera place Jean-Paul II… Diable !… Pourquoi une telle précipitation ? Est-ce un signe de reconnaissance envoyé à une fraction de votre électorat qui a besoin d’être rassuré ? ». Dans le brouhaha général engendré par cette déclaration (les prochaines municipales sont en 2008, alors que 2007 connaîtra une présidentielle et des législatives), la voix du Docteur Jacquat émerge : « Dominique Gros, il est catholique ! ». Pierre Bertinotti poursuit dans un domaine un peu plus catégorique : « notre République est laïque, elle prône la séparation de la société civile et de la société religieuse. Il ne doit pas y avoir d’interférence entre le pouvoir religieux et le pouvoir politique ».
Après ces interventions de l’opposition, trois adjoints, grenadiers de la majorité municipale, font leur entrée en jeu. Le Professeur Muller, tout d’abord, rappelle que le défunt pape fut un homme « au charisme immédiat », un « homme de liberté », qui a « rassemblé la jeunesse, toutes les jeunesses ».
Marie-Françoise Thull pour sa part souligne que Jean-Paul II a été « un géant de l’Histoire et un géant de l’Église ». Elle cite comme exemple ses différentes initiatives en matière de dialogue interreligieux ainsi que les Journées Mondiales de la Jeunesse (JMJ). Patrick Thil, par ailleurs rapporteur du point, ponctue avec sa grandiloquence habituelle en citant de précédents exemples d’attribution de noms de rues (Rabbin Élie Bloch, Pasteur Ferry, Monseigneur Dupont des Loges …) et en insistant sur le caractère rassembleur du personnage. Il termine par ces mots, en partie adressés à l’opposition : « Eh bien, mes amis, pour être fidèles à ce nom dans l’Histoire, réconciliez donc la vertu de la tolérance qui est la vôtre avec la tolérance religieuse, et Metz n’en sera que plus grande ».
À noter que Jean-Paul II, dans le civil Karol Wojtyla (né à Wadowice, Pologne, le 18 mai 1920, mort en la Cité du Vatican le 2 avril 2005) a effectué à Metz le lundi 10 octobre 1988 une visite qui restera à jamais gravée dans l’histoire de la ville. Invité quelques mois plus tôt par le maire Jean-Marie Rausch, qui s’était déplacé personnellement au Vatican pour inviter de vive voix le Saint-Père au cours d’une audience privée, Jean-Paul II fit un écart d’une journée par Metz à l’occasion d’un déplacement prévu en Alsace. Le fait marquant fut l’office célébré en la cathédrale Saint-Étienne qui suscita la ferveur d’une imposante foule de fidèles, tant à l’intérieur qu’à l’extérieur de l’édifice. Une plaque commémore cette visite à l’intérieur de la cathédrale près de l’entrée de la Grande Sacristie.