Avec Mimèsis, un design vivant, le Centre Pompidou-Metz offre au visiteur un passionnant voyage des années 1930 à nos jours, en retraçant l’histoire de certaines évolutions technologiques en regard de celle de l’observation de la nature.
La fascination de l’homme pour la nature a toujours été présente dans l’histoire de l’art, se prolongeant à travers la création d’objets ou environnements fonctionnels – on le sait bien par ici, avec l’influence exercée par la nature sur l’inspiration des artistes de l’Art Nouveau.
Démarrant toutefois plus tard son parcours, l’exposition révèle combien l’observation de la nature a pu évoluer. Et comment les mutations technologiques, fondamentales dans le champ du design, ont accompagné la démarche des créateurs, de la représentation et l’imitation à l’intégration de la nature et même du vivant dans la matière des objets.
L’exposition part même de là, dans l’outrance et l’exubérance créative qui s’appuie sur les logiciels de simulation. Elle accueille le visiteur avec Grotto II de Michel Hansmeyer, réminiscence des grottes de la Renaissance où les excroissances de formes naturelles se subdivisent. À côté l’ambiguïté entre art et design se poursuit avec un fauteuil et des panneaux nés de la croissance de cristaux d’alun.
Un cabinet de curiosité vient vite apporter quelques clés, correspondances entre observation de la nature et disciplines artistiques (photos de Brassaï…), artifice et notions de modernité.
Une mise en bouche avant de suivre une génération de créateurs réunis autour du biomorphisme. De la démarche humaniste du finlandais Alvar Aalto où la recherche d’épure en harmonie avec le vivant s’allie à la technique du bois courbé et cintré, au travail de Charlotte Perriand, son rapport à la matière brute, sa collecte d’objets naturels et ses liens avec le mouvement Mingei. En passant l’une des figures de celui-ci, Sori Yanagi et son tabouret Butterfly, ou le magnifique prototype de bureau de Carolo Mollino de 1950. Jusqu’aux recherches des Eames qui aboutiront à la production à grande échelle à partir des années 40 aux USA.
Plus loin, la Pop culture marie l’hédonisme des années 60 aux lignes ludiques et ergonomiques pour mieux libérer du langage du design – le corps s’y rapproche du sol pour mieux épouser la nature. Ce sont les sièges et fauteuils de Pierre Paulin, la chaise longue d’Olivier Mourgue (qu’on retrouve dans 2001, Odyssée de l’espace de Kubrick), la chaise tulipe de Saarinen ou les italiens du groupe Superstudio.
Une salle est dédiée à la recherche biomimétique de Serge Mouille, déclinant les processus de la nature dans le travail du métal et des luminaires. Avant que celle-ci ne soit directement incorporée à l’objet de création post-industriel : la lampe Foglia d’Andrea Branzi, la chaise tripode de Starck, le banc fallenTree ou le rideau d’algues des frères Bouroullec. Les 10 plateaux de leurs Rêveries urbaines offrent ensuite un répertoire merveilleux de réappropriation de l’espace public.
La salle Recréation numérique joue la prolongation de l’entrée du parcours. La technologie, et notamment l’impression 3D, dépassent la représentation pour user de simulations, et repousser les limites formelles, comme pour les tables Growth Titanium de Bengtsson ou Gingko Carbon Table de Lovegrove.
Dans une salle dédiée aux chaises longues, celle organique des Eames ou évoquant la notion de mouvement – Divan Duchess de la jeune Aurélie Hoegy, l’épure se met au service de l’ergonomie.
La fin nous projette dans une dimension plus responsable et respectueuse de l’environnement, avec l’utilisation de biomatériaux, de manière pertinente (des algues invasives passent de déchet en matériau aux possibilités multiples) ou troublante. Telle cette Mycelium Chair, fusion de champignons et d’impression 3D, qui continue à respirer et donc à croître.
De là à imaginer la nature obligeant bientôt l’homme à s’y réintégrer…