La Commission européenne envisage de rendre obligatoire le Nutri-score (ou son équivalent) sur tous les produits alimentaires. Une démarche qui soulève un tollé de la part des producteurs de fromages, de vins, de charcuteries et autres huiles d’olives.
Cela fait 5 ans maintenant que sur certains produits alimentaires est affiché ce que l’on appelle le nutri-score. C’est ce petit système de notation qui classe les aliments de la lettre A, sur fond vert qui signifie que le produit en question affiche un faible apport en glucides, protides et lipides, à la note E, sur fond rouge, qui désigne, au contraire, les aliments avec un apport calorifique très riche. Le score se base sur 100 g ou 100 ml de produit. Cela permet donc au consommateur d’avoir une petite idée de la valeur nutritionnelle d’un produit, l’ambition étant de lutter contre la malbouffe et ses sombres conséquences : obésité, diabète, maladies cardiovasculaires… Jusqu’à présent, Nutri-score qui a été adopté par six pays européens (Allemagne, Belgique, Espagne, Luxembourg, Pays-Bas et Suisse), était facultatif.
Mais cela pourrait bien changer puisque la Commission Européenne envisage de rendre ce système de notation obligatoire, très prochainement. Ce qui soulève un tollé général de la part des producteurs de fromages, de vins ou bien encore d’huile d’olive. Pourquoi ? Parce que cela revient à prétendre que certains fromages (les vrais, avec du « gras » dedans), de facto classés D ou E, sont « mauvais pour la santé », plus « mauvais », en tout cas, qu’une canette de soda light industriel (mieux notée qu’un jus de fruit). Et peu importe si ces fromages sont AOP ou IGP, autrement dit de qualité (et soutenus à ce titre par les pouvoirs publics), peu importe s’ils contiennent, aussi, des nutriments qui sont bons pour la santé, peu importe le savoir-faire, peu importe, encore, si personne (ou peu de monde) ne se « tape » 100 grammes de fromage à l’issue d’un repas. S’ils veulent une meilleure note, alors il leur faudra passer au lait écrémé et aux conservateurs chimiques. Autre exemple, partant du principe que l’alcool est mauvais pour la santé, des experts invitent la Commission à coller un F (en noir) à toutes les boissons alcoolisées et peu importe le degré d’alcool. Comprendre que tous les vins (comme les bières) seront considérés comme la boisson du « diable », même consommés avec modération.
L’Italie qui est le premier producteur mondial de vin (et de parmesan) est d’ores et déjà montée au créneau pour dénoncer cet étiquetage inacceptable. C’est le cas aussi, en France, des producteurs de roquefort, comté et autres maroilles, en Espagne avec les producteurs d’huile d’olive… Et cela avec pour ambition d’en finir avec ce « truc », pour les plus radicaux, d’être exemptés de vignettes ou tout du moins de faire en sorte que soient modifiés les critères du Nutri-score (en l’occurrence son algorithme) qui est totalement « anti-gras » comme si tous les gras étaient mauvais. Ce serait d’ailleurs en cours puisque les comités scientifiques qui planchent sur le sujet, laissent entendre que certains produits sont effectivement injustement notés.
Si cela réagit, c’est aussi car c’est la France qui exerce actuellement la présidence semestrielle du Conseil de l’Union Européenne, pays est-il nécessaire de le préciser, qui a toute une culture à défendre en ce qui concerne la table et ses produits du terroir, ce qui invite à ne pas tomber dans l’excès en matière de réglementation. Certes, Nutri-score ou pas, le consommateur décide, in fine, de ce qu’il met dans son assiette ou dans son verre. Qu’il soit informé de manière à faire des choix nutritionnels opportuns (ou censés l’être en sachant que les étiquettes délivrent déjà d’autres informations) est louable et même nécessaire mais que les produits « gourmands » (et non-industriels ou non transformés) des terroirs soient systématiquement stigmatisés, ça ne l’est pas.