David Soner a célébré cet été les 30 ans de son premier graff’ officiel sur un mur. Depuis, il n’a eu de cesse d’affiner ses prédispositions artistiques, multipliant les passerelles entre dessin, graphisme et culture hip hop.
Dans la région, il est un peu considéré comme le parrain de la communauté des graffeurs. Une référence. Il faut dire qu’il a été le premier. À franchir le cap dans l’espace urbain. À Laquenexy où il résidait adolescent, puis à Metz dans le quartier de Borny où 2 fresques lui ont été commandées dès fin 1992 et début 1993.
« Même avec 2 générations d’écart, les plus jeunes respectent mon côté précurseur, s’étonne David Soner. Je n’ai jamais ressenti le moindre signe de moquerie. Forcément, cela fait plaisir. »
30 ans, un anniversaire fêté du 2 au 4 septembre au Bowl–Skate Park de Metz avec une Jam Graffiti organisée avec Myriama Idir, commissaire d’exposition du parcours de street art de Constellations 2021. La boucle est bouclée.
L’histoire remonte à un peu moins de 40 ans. Lorsqu’à 10 ans, le jeune David, repéré dès la maternelle pour ses talents en dessin, prend dans la figure la culture Hip Hop alors naissante. Avec la fameuse émission H.I.P. H.O.P. animée par Sidney sur TF1 en 1984. « J’étais déjà sensibilisé à la street culture américaine à travers le BMX et le skate. Mais je suis immédiatement tombé amoureux de cette nouvelle culture, en décalage de ce qui existait alors. Voir les grands du quartier qui dansaient, tournaient sur la tête… On portait des gants blancs, et même Pif gadget offrait sa casquette spéciale smurf ! »
S’il opte définitivement pour le graffiti au moment de ses premières fresques dans l’espace public, David se sera essayé à tout. « J’étais très mauvais en rap, mais je me débrouillais pas mal en danse. J’étais même assez respecté sur ce plan par les mecs de Borny alors que je n’y habitais pas, au moment de la rivalité du quartier avec Saint Éloi. »
Pour autant, Soner ne se sent pas à l’aise avec la démarche vandale du graffiti, celle qui investit les murs et autres supports de l’espace public de manière sauvage. Il plus enclin à défendre les valeurs de la Zulu Nation d’Afrika Bambaataa. « J’étais peut-être trop timide. Il m’était impossible d’aller avec mes bombes de peinture le long des autoroutes ou des voies ferrées. » Il se distingue assez rapidement, d’un événement à la FIM à d’autres commandes, pour l’espace public ou des magasins comme Sunset Boulevard ou 3DX. Il passe même à la télé, sur RTL9, alors qu’il est encore au lycée. « J’ai tout de suite été connu. C’était assez dingue. La culture Hip Hop était pourtant encore hyper confidentielle. On était au mieux incompris sinon raillés. Très vite j’ai voulu faire respecter cette esthétique, la montrer au public le plus large. » Cela reste son credo.
Pour autant, ce n’est qu’autour de 2005 qu’il imagine passer du hobby à une démarche professionnelle. Il faut dire qu’entretemps, Soner a entrepris avec succès une formation de graphiste, intégrant rapidement des agences de communication au Luxembourg pour travailler sur de la corporate identity et du design digital dès 2007. Une activité multi-casquette menée en parallèle avec le graff : premières expositions en nom propre, concours (lauréat pour la RATP), l’aventure East Bloc party avec la Cité Musicale de Metz…La reconnaissance.
En 2014, se jugeant trop bridé par le graphisme classique, il opte pour l’indépendance. À cheval entre le graphisme et le statut d’artiste. Depuis son style s’est affirmé : « Mon travail a explosé. J’ai eu plus de temps et de moyens pour m’épanouir. » Dans une porosité créative entre ses deux domaines d’expertise, intégrant un goût prononcé pour la calligraphie nourri depuis l’enfance. Aujourd’hui, il ne travaille presque plus sur papier mais réalise ses esquisses d’illustration ou autres sur tablette avant de vectoriser sur ordinateur. Sans pour autant délaisser toiles ou murs, pour des commandes publiques ou privées. On a récemment pu apprécier sa fresque Le Paradis à Frescaty, ou toute la façade de la Fondation Abbé Pierre à Metz.
30 ans… Et des projets pour en nourrir autant, un œil vers l’international.
Dans le cadre de son programme de résidentialisation, le Groupe Vivest a passé commande d’une convention Street Art au collectif Une Phase 2 Styles pour créer une identité de quartier à Metz Nord, à la lisière de Woippy. Avec des fresques d’envergures (exemples en vidéo sur le site Vivers.fr) et l’habillage de mobilier urbain. C’est Soner qui a clôturé l’opération cet été avec la fresque Cache cache.