Fondée en 2004 par un groupe d’étudiants ukrainiens, l’association messine Échanges Lorraine Ukraine (ELU) est très mobilisée depuis le début de la guerre en Ukraine pour venir en aide aux Ukrainiens et aux réfugiés. Plus d’infos avec Frédéric Nivol, son secrétaire général.
Comment l’association ELU agit-elle ?
La priorité a été de mobiliser la population locale et de partager de l’information tant auprès des Messins et des Mosellans que de la diaspora et des Ukrainiens via notre page Facebook (AssociationELU). Nous continuons à agir en ce sens mais nous nous sommes aussi positionnés comme une plateforme visant à recueillir toutes les bonnes volontés. Ce sont plus de 350 offres de services que nous avons recensées notamment en matière d’hébergement. Nous invitons toutes ces personnes à remplir des formulaires de manière à gérer au mieux ces offres et cela en collaboration avec les services de la ville et ceux de l’Etat. Je profite d’ailleurs de ces quelques mots pour souligner la formidable mobilisation de tous les services de la ville de Metz et de son maire, François Grosdidier. C’est énorme ce qui a pu être accompli ces derniers jours.
De quoi avez-vous encore besoin, vous et vos partenaires ?
Il nous faut surtout des produits d’hygiène et de premiers secours ainsi que des produits destinés aux bébés et aux enfants. Mais aussi et surtout des dons financiers car cela nous permet de précisément répondre aux besoins et à leurs évolutions.
Emploi, scolarisation, alphabétisation… Comment ces dossiers évoluent-ils ?
En ce qui concerne l’école, des initiatives s’enclenchent avec la ville et l’Etat. En matière d’emploi, des contacts sont noués avec des entreprises. Tout cela va prendre un peu de temps pour se mettre en place mais nous avançons. Mais pour aller à l’école ou travailler, la priorité c’est d’apprendre le français. ELU dispose d’une école ukrainienne qui assure des cours d’ukrainien pour les enfants et les adultes, elle est déjà mobilisée et des cours de français se mettent en place.
Les membres de l’association ELU sont fortement mobilisés depuis le 24 février. Le moral est bon ?
Il y a beaucoup de fatigue, d’angoisse, de tensions… Nous nous mobilisons du mieux que nous pouvons. Nous nous organisons aussi. La priorité c’est non seulement être efficaces face à l’urgence mais aussi, et surtout, dans la durée car pour l’heure, nul ne sait, combien de temps cette situation dramatique durera. Quoi qu’il arrive, nous serons prêts.
« Je m’engage pour l’Ukraine »
Le gouvernement a mis en place une plate-forme en ligne ayant vocation à « accompagner » les Français désireux d’accueillir chez eux une famille ukrainienne ayant fui son pays : Je m’engage pour l’Ukraine, accessible à l’adresse suivante : parrainage.refugies.info. Elle permet à ceux qui le désirent de s’engager dans une mission de bénévolat auprès d’une association, de faire un don financier ou en produits/matériels, de proposer des services (traduction, par exemple) ou bien encore un hébergement. En ce qui concerne ce dernier, il est précisé sur la plateforme qu’il doit être suffisamment détaillé pour qu’un appariement pertinent puisse être réalisé. « Si votre proposition répond à des besoins existants pour les déplacés ukrainiens, vous serez contactés lorsqu’une demande près de chez vous sera exprimée. Le recensement est instruit par les préfectures compétentes ».
« Les accueillir aussi longtemps qu’il faudra »
« Efficaces face à l’urgence, mais aussi et surtout dans la durée »Je rentre tout juste de la frontière ukrainienne où je me suis rendu pour ramener une maman et ses deux enfants chez nous ainsi qu’une dame âgée qui a continué sa route vers Lyon. Il faut savoir que les réfugiés sont entassés dans des grands centres. Nous accueillons déjà une autre famille également composée de trois personnes. Nous en avons même abrité une troisième mais elle a poursuivi sa route pour rejoindre des connaissances. Nous sommes très attachés à ce pays et à sa population. Ma femme Oksana est Ukrainienne, elle a d’ailleurs fait partie des traductrices qui ont participé au déplacement en bus organisé par la Ville de Metz. Personnellement, c’est mon pays de cœur, l’Ukraine est un pays superbe qui gagne vraiment à être connu. Et les Ukrainiens le prouvent au quotidien : ils sont dignes, courageux et prêts à se battre pour leur liberté. Il faut savoir que les femmes ne veulent pas s’éloigner de l’Ukraine, ce sont les hommes qui leur demandent de partir pour se mettre à l’abri. Depuis leur arrivée chez nous, ils mettent tout en place pour se débrouiller seuls malgré l’inquiétude et l’angoisse. Les enfants sont bien entendu effrayés. Mais tous ne veulent surtout pas être assistés ou gêner. L’une des jeunes filles, qui a 23 ans, est déjà très active pour se trouver un emploi au plus vite. C’est vraiment un devoir de les accueillir et cela aussi longtemps qu’il le faudra. C’est une vraie immigration de guerre. Actuellement les combats font rage partout ou presque, y compris dans les campagnes. Près de chez mes beaux-parents, la ville de Bachtanka est bombardée par les Russes, avec des maisons civiles détruites. Je n’écarte d’ailleurs pas l’idée de refaire un aller-retour pour récupérer encore quelques personnes mais je m’organiserai alors pour ne pas faire le voyage seul 3 000 km en deux jours, c’est épuisant ». Témoignage d’emmanuel Lucas