Le Messin d’adoption Romain Muller s’apprête à sortir Accroche-cœur, nouveau disque qu’il dévoilera en concert lors d’une “release party” aux Trinitaires. L’occasion de revenir sur le parcours du trentenaire, son répertoire de pop synthétique à la mélancolie sautillante et son quotidien de musicien.
Cela fait des années que je n’avais pas pensé à cette anecdote. Mes souvenirs sont un peu flous. » Nous sommes attablés depuis une demi-heure et Romain Muller confesse avoir du mal à en resituer certains.
Les choses se sont effectivement accélérées depuis son installation à Metz en 2017 avec sa compagne Mélodie, indissociable de sa vie de musicien. Un déménagement synonyme de changement d’optique : c’est ici qu’il s’est convaincu de placer sa démarche artistique sous le sceau de l’individualité, trouvant à Metz bien plus qu’à Strasbourg l’environnement idéal à son émancipation. « Tout est plus facile ici. On croise toutes sortes d’acteurs culturels, notamment lors de concerts aux Trinitaires, ce lieu magnifique et convivial. Et j’ai étonnamment été vite soutenu par les institutions. »
Il consacre désormais son goût pour le collectif, avec un enthousiasme non feint, en se plaçant un peu plus dans l’ombre, d’actions culturelles auprès des scolaires pour la Cité Musicale en compositions pour des documentaires ou des installations numériques (Constellations, Esch 2022…). Sans oublier Coco Machine, structure montée avec Mélodie Boubel, sa compagne, pour promouvoir d’autres groupes ou artistes, vite devenu un label. « On est sur le point de signer Monsieur Pélican, groupe de Nancy qui fait une chanson un peu électronique chic et sensible. La synthèse de tout ce que j’attendais. » Ce pourrait être la définition même de sa propre pop.
Ce natif d’Epinal s’est pourtant essayé à plein de styles musicaux depuis les années du collège et son premier groupe… de metal. Jouer d’un instrument n’a pourtant pas été la clé initiale pour entrer dans le monde de la musique. « Mon père était un assez bon musicien qui a joué dans plein de groupes. Tout petit je faisais des crises pour aller le voir jouer. Mais ce qui m’intriguait le plus, c’était ce qui se passait en coulisses dont l’accès m’était interdit ! »
Doué en dessin, renonçant très vite à une hypothétique carrière de footballeur, délaissant des études de commerce pour celles de l’Histoire (« Mon autre passion. ») Romain a enchaîné les groupes en même temps qu’il élargissait sa culture musicale. Jusqu’à ce Posterboy Machine avec sa sœur et son meilleur ami, au parcours morcelé sur une douzaine d’années, petite notoriété nationale à la clé.
C’est à Metz, fin 2019, qu’il clôt définitivement le chapitre pour envisager l’aventure en solo, jusque là trop compliquée à assumer. Mais pas son nom. « Je me suis démarqué en faisant une musique populaire avec un nom archi banal pour la région. »
Et là tout s’enchaîne. Un premier EP Bain de minuit début 2020 et la frustration de ne pouvoir le défendre pleinement avec les confinements, un premier album Parallèle à peine un an plus tard, salué par la critique (Coup de cœur Radio France entre autres). Romain réussi à s’affranchir de ses freins à écrire des textes plus intimes. Et affirme peu à peu un style : une pop basée sur les synthétiseurs et « des arrangements classiques à la sauce électro », faussement propre. De filiation Eli & Jacno (« la quintessence de la pop sans format »), Taxi Girl/Daniel Darc ou Flavien Berger « Des sonorités accessibles où percent subtilement des singularités dissonantes. »
Un jeu de contrastes où vient se poser une voix de tête sensible, faussement fragile. Portant des textes au regard cinématographique partant d’un simple détail du quotidien, façon Nouvelle Vague. « C’est comme une capture d’écran dans un moment d’absence. 2 ou 3 phrases me viennent immédiatement, avec la mélodie. Si je mets plus de 3 jours à écrire un morceau, je le jette. » Ce prolifique adepte de la spontanéité a déjà le prochain album en boîte.
Pour l’heure sort Accroche-cœur (« Prêt depuis 8 mois ! »), où sa pop synthétique se pare d’accents discoïdes (« Mais une disco sombre. »). 5 titres qui, comme les précédents, harponne quasi immédiatement l’auditeur sous leurs faux airs de ritournelles.
À l’image de La statue… qui ne laisse par de marbre.
Le 20 octobre aux Trinitaires à Metz