Espérance de vie plus faible, surmortalité précoce, maladies chroniques en hausse : la révision 2025 du Schéma régional de santé (SRS) livre un tableau préoccupant de l’état de santé de la population dans le Grand Est. L’Agence régionale de santé (ARS) alerte sur des tendances lourdes, qui accentuent les inégalités sociales et territoriales.
La région Grand Est cumule plusieurs fragilités sanitaires. Démographie vieillissante, pauvreté diffuse, inégalités sociales marquées : tous ces facteurs influencent la santé des habitants. Selon l’ARS, la région affiche des résultats plus dégradés que la moyenne nationale sur la plupart des indicateurs clés.
Une espérance de vie en recul
Premier signal inquiétant : l’espérance de vie dans le Grand Est est inférieure à la moyenne nationale. En 2021, une femme née dans la région peut espérer vivre 84,4 ans, soit près d’un an de moins qu’au niveau national (85,3 ans). Pour les hommes, l’écart est similaire : 78,6 ans dans le Grand Est contre 79,4 ans en moyenne en France. Certains départements sont particulièrement touchés. Dans les Ardennes et la Meuse, l’espérance de vie est jusqu’à deux ans plus courte que dans les territoires les mieux lotis. Ces écarts révèlent des disparités sociales et environnementales persistantes.
Une mortalité prématurée trop élevée
Le taux de mortalité avant 65 ans atteint 181 décès pour 100 000 habitants dans le Grand Est. C’est davantage que la moyenne nationale (175). Ce chiffre masque des écarts internes importants. Tandis que le Bas-Rhin et le Haut-Rhin présentent des taux plus favorables que la moyenne française, les Ardennes et la Haute-Marne enregistrent des surmortalités très inquiétantes (+45 et +30 points respectivement). Cette mortalité prématurée est en grande partie liée à des maladies chroniques évitables, à des comportements à risque et à un défaut d’accès aux soins précoces.
Une région très exposée aux maladies chroniques
Cancers, maladies cardiovasculaires, diabète, troubles respiratoires : la prévalence de ces pathologies est plus forte dans le Grand Est que dans d’autres régions. En particulier, les maladies cardio-neuro-vasculaires et les complications du diabète y sont surreprésentées. L’ARS souligne également un niveau préoccupant de surpoids et d’obésité. Un habitant sur deux est en surpoids, et un sur cinq en situation d’obésité. Ces facteurs de risque aggravent les pathologies chroniques et pèsent lourdement sur le système de santé régional.
Un gradient social marqué
La santé dans le Grand Est varie fortement selon le statut social. Les enfants d’ouvriers ont deux fois plus de risques d’être en surpoids que les enfants de cadres. Cette inégalité s’installe dès le plus jeune âge et se répercute tout au long de la vie. Avec 432 000 personnes vivant sous le seuil de pauvreté, dont une part importante dans les 116 quartiers prioritaires de la région, la précarité reste un facteur aggravant. Elle limite l’accès aux soins, complique la prévention et pèse sur la santé mentale.
Des facteurs environnementaux aggravants
L’ARS pointe aussi les effets du cadre de vie. Pollution de l’air, exposition au bruit, habitat dégradé, accès inégal aux transports : autant de déterminants sociaux de la santé qui accentuent les pathologies déjà présentes. La région se caractérise par une forte dualité entre des zones urbaines denses et des territoires ruraux isolés. Cette configuration territoriale complexifie la prévention et rend plus difficile la mise en œuvre d’une politique de santé homogène.
Une jeunesse vulnérable
Le rapport souligne enfin les fragilités croissantes chez les jeunes. Les troubles de la santé mentale sont en hausse, notamment depuis la crise sanitaire. Les comportements à risque — addictions, alimentation déséquilibrée, sédentarité — progressent dans certains milieux scolaires ou familiaux fragilisés. La prévention reste difficile à déployer à grande échelle, en raison d’un manque de coordination entre les acteurs de santé, de l’éducation et du champ social.
Un défi sanitaire majeur
L’ARS Grand Est ne se contente pas de dresser un état des lieux : elle alerte sur l’urgence à agir. La révision 2025 du Schéma régional de santé s’appuie sur ces indicateurs pour ajuster les politiques publiques. Des priorités émergent : mieux cibler les territoires les plus en difficulté, renforcer la prévention dès l’enfance, décloisonner les acteurs de santé, et surtout, lutter contre les inégalités. Ce travail de fond se veut structurant. Mais il devra s’accompagner d’un engagement fort des collectivités, des professionnels de santé, et des citoyens eux-mêmes.
Le SRS (Schéma régional de santé) 2023-2028 révisé, début juillet de l’Agence régionale de santé (ARS) Grand Est est disponible en ligne :







