Dans Belfast, Kenneth Branagh signe ses mémoires sur grand écran. À travers le filtre patiné de la nostalgie, il revient sur son enfance dans une Irlande du Nord vivement troublée.
À la fin des années 1960, la capitale de l’Irlande du Nord devient le théâtre de violents conflits qui opposent la communauté catholique, républicaine et nationaliste, à celle des protestants, monarchiste et unionistes. C’est le début des « Troubles » qui vont secouer et déchirer le pays durant plus de trente ans. La colère sociale gronde, et les rues de Belfast se transforment en champ de bataille. Mais ce n’est pas la grande histoire que le réalisateur britannique Kenneth Branagh veut nous raconter. C’est bien plutôt celle de Buddy, un garçon plein d’entrain et de curiosité, qui a 9 ans en été 1969. Habitant avec sa famille ouvrière et protestante dans les quartiers nord de la province d’Ulster, il est choyé et protégé par son père, sa mère, son frère et ses grands-parents aimants. Certes, la guerre civile fait rage au pas de la porte de sa maison. Mais le garçon apprend à naviguer à travers le chaos, et les souvenirs qui en ressortent sont étonnamment ceux d’une enfance heureuse : les après-midis à regarder Star Trek à la télévision, les virées familiales au cinéma (présageant déjà sa passion future pour la pellicule), les jeux dans la rue avec les voisins, les premiers béguins. C’est au prix de sacrifices auxquels le réalisateur rend hommage : si Belfast est une lettre d’amour à sa ville natale, elle l’est aussi à ses parents, que Buddy appelle « Pa » et « Ma ». Le père, interprété par Jamie Dornan, travaille dans une menuiserie et est amené à voyager souvent en Angleterre. Sa mère, jouée par Caitríona Balfe, est une femme au foyer qui tente de régler les dettes de la famille. Le dilemme, pour ces derniers, est le suivant : faut-il rester à Belfast ou la quitter ? Et partir, est-ce une question de survie ou une manière résignée et lâche de laisser la ville aux mains armées des opposants extrémistes ? Le choix est délicat mais déterminant pour l’avenir du jeune Buddy. Kenneth Branagh ramène la banalité du quotidien et la naïveté enfantine au cœur de la violence et des tumultes. Il ne peut en ressortir qu’une forme de surréalisme. Belfast est un film sentimental que le voile de la nostalgie façonne avec douceur, en noir et blanc, et avec comme bande son Van Morrisson.
Sortie le 2 Mars