Imaginez un monde où le délicat problème de l’équilibre entre travail et vie personnelle est enfin résolu : le cerveau domestique reste à la maison, tandis que le cerveau professionnel ne dépasse pas les portes du bureau. Avec Severance, Ben Stiller signe une série dramatique décalée sur l’enfer du monde du travail.
Dans la société actuelle, la question du bien-être au travail fait débat. Et on sait que la crise sanitaire n’a fait qu’augmenter le nombre de burn-outs. Chez Lumen Industries, entreprise tout à fait fictive, on a trouvé la solution (ou tout du moins, le croit-on) : il suffit de séparer vie professionnelle et vie privée, littéralement. À l’aide d’une puce microscopique insérée dans le cerveau au cours d’une opération chirurgicale, on oublie, durant le temps de travail, qui on est dans la vie de tous les jours. Et lorsque l’on sort du bureau après une journée de dur labeur, on ne sait rien de la personne qu’on a été pendant les quelques heures précédentes. C’est le choix radical qu’ont fait Mark (Adam Scott) et ses collègues, exerçant chacun à l’étage de la « dissociation » (« severance » en anglais). Toute la journée, ils fixent des chiffres aux messages sibyllins, sur un écran d’ordinateur au design désuet. On comprend rapidement que le quarantenaire, veuf depuis deux ans, a voulu faire disparaître la douleur de son deuil au moins pendant quelques heures dans sa journée. Car c’est là l’intérêt apparent de cet implant : le soi professionnel, celui de l’intérieur, est débarrassé de tout fardeau et de toute contrariété que peut trainer avec lui le soi domestique, celui de l’extérieur. Et vice-versa. Oui mais (car il y a un « mais ») : qu’il soit dehors ou dedans, Mark n’a en fait ni perspective ni échappatoire, et sa réalité tient du cauchemar. C’est avec la disparition d’un de ses collègues de travail que l’employé se retrouve confronté à ce constat dérangeant. Et l’arrivée de Helly (Britt Lower), une nouvelle recrue qui regrette amèrement sa décision et qui cherche donc à démissionner (en vain) vient d’autant plus chambouler les certitudes de Mark.