Près de 600 artisans, entrepreneurs et partenaires se sont retrouvés le 2 octobre 2025 au FC Metz Stadium pour l’Assemblée générale de la Fédération BTP de la Moselle. Un rendez-vous placé sous le signe des incertitudes, mais aussi porteur d’espoirs pour un secteur qui, selon son président Pierre Schaeffer, avance « comme un équilibriste » dans un contexte d’instabilité économique et politique
L’événement a réuni un large public professionnel, en présence notamment de deux invités de marque : l’économiste Philippe Dessertine, venu décrypter la conjoncture mondiale, et Julien Lebras, acteur de la reconstruction de Notre-Dame de Paris. Mais l’attention s’est surtout concentrée sur les messages adressés par la Fédération aux décideurs. Dès l’ouverture, Pierre Schaeffer a choisi une image forte : « Équilibriste ! Voici le nouveau métier des artisans et entrepreneurs de BTP ! » Selon lui, les entreprises avancent dans un environnement où « les mesures sont contradictoires, suspendues aussitôt annoncées, ou renvoyées à plus tard ».
Le logement neuf en recul
Le marché du logement peine à repartir malgré une hausse des permis de construire. En Moselle, seules 4 200 mises en chantier ont été enregistrées sur un an, contre 5 700 en 2022. « C’est une chute de 25 %, et cela reste largement insuffisant pour répondre à la demande », a rappelé le président.
Il a insisté sur le rôle fondamental de la construction : « Le logement n’est pas un bien comme un autre, il répond à un besoin essentiel : avoir un toit au-dessus de la tête. » Face aux critiques qui accusent le secteur de bénéficier de trop d’aides, il a tenu à rétablir les faits : « 43 milliards d’euros de dépenses publiques sont consacrés au logement, mais 96 milliards de recettes fiscales en reviennent chaque année. »
MaPrimeRénov’ : un coup de frein brutal
Longtemps moteur de l’activité, la rénovation énergétique traverse une période difficile. Le gel brutal de MaPrimeRénov’ décidé en juin a été vécu comme une trahison : « C’était un coup de couteau dans le dos », a lancé le président, dénonçant une décision brutale. La reprise partielle du dispositif n’a pas apaisé les inquiétudes. Les nouvelles conditions excluront dès 2026 certains travaux comme l’isolation des murs ou les chaudières biomasse. « Nos concitoyens comme nos entrepreneurs ont besoin de mesures compréhensibles et stables. Pas d’une réforme tous les quatre mois », a-t-il insisté, rappelant que MaPrimeRénov’ a déjà connu quinze changements depuis 2020.

Concurrence déloyale et pratiques douteuses
La Fédération poursuit son combat contre les « éco-délinquants » qui profitent des aides pour proposer des travaux douteux. « Ces marchés doivent revenir aux entreprises sérieuses, qualifiées et compétentes, c’est-à-dire aux nôtres », a martelé Pierre Schaeffer.
Le président a également pointé la concurrence déloyale permise par le statut de micro-entrepreneur. Pour lui, une réforme fiscale s’impose : « Nous défendons une franchise de TVA abaissée à 25 000 euros. C’est un levier essentiel pour rétablir des conditions équitables. »
Des entreprises fragilisées
La fédération a alerté sur la progression des défaillances : +10 % dans le Grand Est en un an, et un recul net de 100 entreprises en Moselle. L’emploi est touché avec 500 postes supprimés. « Nos carnets de commande s’amenuisent, nos marges se fragilisent et nos trésoreries souffrent », a résumé le président.
REP bâtiment : un dispositif à revoir
La responsabilité élargie du producteur (REP), censée améliorer le recyclage des déchets de chantier, est jugée défaillante. « En théorie, le concept est séduisant. En pratique, c’est un fiasco complet », a dénoncé Pierre Schaeffer. Face aux carences des éco-organismes, la Fédération a décidé d’engager un recours contre l’État afin d’obtenir une refonte totale du système.
Miser sur la formation
Malgré ces difficultés, la profession garde un atout : sa capacité à former. Chaque année, environ 1 000 embauches sont réalisées en Moselle. L’apprentissage progresse, avec 1 100 jeunes inscrits dans les CFA de Montigny-lès-Metz et Sarreguemines, soit une hausse de 10 %. « L’apprentissage reste notre voie royale », a rappelé le président. Les investissements suivent : 650 000 euros sont consacrés chaque année au renouvellement des équipements, et une extension du CFA de Sarreguemines est en cours pour doubler la surface d’accueil.
Un appel à la stabilité
En conclusion, le président a résumé l’attente de toute une profession : « De la stabilité, c’est le vœu le plus fort de nos artisans et entrepreneurs ». Pour lui, la filière a toujours su être responsable et constructive. Avant de quitter la tribune, il a rappelé une évidence : « Ce sont nos entreprises qui créent de la richesse, et ce sont elles qui la redistribuent. »