Isabelle Adjani jouant dans un film de François Ozon, c’est une première. Dans Peter von Kant, le rôle principal revient cependant à Denis Ménochet : celui d’un célèbre réalisateur s’amusant non sans cruauté avec son assistant puis son nouvel amant.
Ce n’est un secret pour personne : François Ozon aime le travail de Rainer Werner Fassbinder. Il y a vingt-deux ans, il offrait déjà une adaptation d’une des pièces de théâtre du cinéaste et dramaturge allemand, avec Gouttes d’eau sur pierres brûlantes. Ce mois-ci, Ozon réécrit pour le grand écran une autre œuvre de ce dernier, non sans prendre des libertés avec l’original. Les Larmes Amères de Petra Von Kant ont déjà connu une adaptation cinématographique par Fassbinder lui-même, en 1971. Ce long-métrage, et de fait la pièce dont il est issu, avait une distribution exclusivement féminine. Les deux œuvres dressent le portrait d’une créatrice de mode installée à Brême et de sa relation aux autres femmes. Brillante et réputée, elle est aussi narcissique, excessive et se montre sadique avec son assistante, Marlene, qui habite sous son toit. Elle fait un jour la rencontre de Karin, dont elle tombe passionnément amoureuse. Chez François Ozon, Petra devient Peter, tandis que Marlene s’appelle à présent Karl et Karin prend les traits du bel Amir. Dans cette libre adaptation, Peter est un réalisateur couronné de succès qui, lui aussi, vit avec son assistant : il prend plaisir à l’humilier et le malmener. Par l’intermédiaire de Sidonie, une éminente actrice, il fait la connaissance d’Amir, un jeune homme d’origine modeste, dont il tombe sous le charme et s’entiche bientôt tout à fait. Pour l’aider à lancer sa carrière dans le cinéma, il l’invite à vivre avec lui. Outre le casting devenu masculin, Ozon a fait le choix d’alléger les textes très littéraires de l’œuvre originale, dans le but de conférer une théâtralité plus française aux dialogues, mais également d’octroyer plus d’émotions à ses personnages. De l’œuvre de Fassbinder, Ozon a tout de même garder l’aspect huis-clos : il a tourné le film pendant le confinement dans un appartement parisien. De quoi exacerber le sentiment de claustrophobie émanant déjà de la relation entre Peter et ses amants.