Malgré l’opposition frontale des élus locaux, l’État a confirmé hier la tenue du rassemblement évangélique national des gens du voyage sur l’ancienne base aérienne de Grostenquin, en Moselle, du 24 août au 1er septembre 2025. Entre promesses de l’État, colère des maires et défis logistiques, la tension monte à l’approche de l’événement.
L’annonce est tombée hier après-midi : le rassemblement évangélique Vie et Lumière des gens du voyage aura bien lieu, une nouvelle fois, à Grostenquin. Cette commune de Moselle, déjà sollicitée à quatre reprises par le passé (2006, 2015, 2017, 2023), s’apprête à accueillir entre 5 000 et 6 000 caravanes, soit près de 25 000 personnes. La préfecture a officialisé la nouvelle, déclenchant immédiatement une vague d’indignation parmi les maires des communes concernées.
Du 24 août au 1er septembre, l’ancienne base aérienne redeviendra ainsi le théâtre d’un rassemblement d’envergure, au grand désarroi des élus locaux. Ces derniers dénoncent un “manque de respect” de l’État. La mairie de Grostenquin ne cache pas son désarroi : « Nous comprenons que cette nouvelle puisse susciter des préoccupations », indique-t-elle dans un communiqué. À Guessling-Hémering, commune voisine, son maire Rémy Franck rappelle que « les plaies de 2023 ne sont pas encore pansées ».
Trois problèmes majeurs déjà identifiés
Le préfet de Moselle, Pascal Bolot, en poste depuis trois mois, n’ignore pas la complexité du dossier. Fort de son expérience en 2015, il a identifié dès à présent trois points de crispation majeurs : l’accès à l’eau, la sécurité routière et la gestion des déjections humaines. Le château d’eau de Grostenquin devra suffire à alimenter l’ensemble du site sans perturber l’approvisionnement des habitants. Côté circulation, les élus redoutent les nuisances liées à l’arrivée massive et au départ progressif des caravanes. Enfin, la propreté du site reste un enjeu central. En 2023, les communes voisines avaient recensé de nombreux dépôts sauvages et excréments humains.
Un dispositif renforcé est promis : plus de toilettes seront installées et jusqu’à 400 gendarmes seront mobilisés quotidiennement au pic du rassemblement. Les premiers arrivants sont attendus dès le 20 août et le départ complet est prévu au 3 septembre, après un état des lieux de sortie.
Les élus dénoncent un engagement bafoué
La colère des maires de Bistroff, Guessling-Hémering, Lelling, Lixing-lès-Saint-Avold et Grostenquin ne retombe pas. Ils dénoncent un abandon de la parole de l’État. Le maire de Grostenquin, Patrick Seichepine, parle d’« affront » et de « désillusion démocratique ». Un souvenir précis les hante : en 2017, le Premier ministre Édouard Philippe avait affirmé que Grostenquin ne serait plus jamais réquisitionnée pour accueillir l’événement. Le président de la communauté d’agglomération de Saint-Avold, Salvatore Coscarella, déplore pour sa part une « situation insupportable » et le député Alexandre Loubet réclame l’annulation pure et simple de la manifestation ainsi que la recherche d’un site alternatif.
Un site provisoire… qui s’éternise ?
Le préfet se veut rassurant. Il évoque un futur terrain d’accueil permanent, à l’étude dans le Loiret. « Grostenquin n’a pas vocation à accueillir indéfiniment ce type de manifestation », assure-t-il. Des alternatives ont été explorées, mais n’ont pas abouti à des solutions satisfaisantes dans les délais impartis.
En attendant, l’État affirme vouloir faire de cette édition un modèle d’organisation. « Nous avons un cahier des charges précis, issu du retour d’expérience de 2023 », indique Pascal Bolot. Les échanges avec le pasteur Charpentier, organisateur de l’événement, ont été réactivés. L’objectif : garantir le respect du protocole et une exécution rigoureuse des engagements pris.
Une coordination complexe mais assumée
En plus des forces de l’ordre et des services de secours, plusieurs institutions seront impliquées : les communes, la communauté d’agglomération, les agriculteurs, l’Office français de la biodiversité. L’enjeu est aussi environnemental, Grostenquin étant situé à proximité de zones Natura 2000 et d’espaces boisés sensibles. « Nous discuterons avec l’ensemble des acteurs pour minimiser l’impact », promet le préfet.
À la veille de l’installation des premiers participants, les élus, les riverains et les services de l’État devront composer avec une cohabitation temporaire mais intense. Et malgré la promesse de vigilance, beaucoup redoutent une répétition des dérives passées.